Atelier IFM/Ecole 42, 2018 : de l’art du pitch
Vendredi dernier, j’ai eu la chance d’ĂŞtre jury d’un « hackathon » menĂ© tambours battants par l’IFM avec l’Ecole 42.
Au coeur des présentations : suggérer des pistes d’amélioration de l’ « expérience utilisateur » en prenant pour point de départ les propres frustration ou les rêves dans les parcours de consommateurs ou consommatrices de marques de mode ou de luxe (ou de plates-formes e-commerce). Avec comme règle de travailler en groupe hybride IFM / 42 et de présenter des solutions innovantes mais aussi réalisables.
Et le jury Ă©tait en soi allĂ©chant pour moi, entre startupers, spĂ©cialistes de la Data, analystes en innovation, sans oublier la prĂ©sence de Futur 404, qui me fait autant plaisir qu’Ă la crĂ©ation de Trendwatching.
Quelques enseignements que je garde de cet après-midi ci-dessous.
HumilitĂ© dans l’analyse du contexte
Il est très, très difficile d’avoir un “insight” pertinent sur lequel construire une proposition de valeur. Certes, l’accès Ă de nombreuses Ă©tudes en ligne donne l’impression de mieux sentir une problĂ©matique. Pourtant, les meilleurs groupes sont ceux qui :
- ont su créer leurs propres analyses, notamment en se rendant sur le terrain
- ont su mettre en relation des Ă©tudes qui n’ont pas forcĂ©ment grand chose Ă voir entre elles mais qui en les croisant prouvent un “sweetspot”
- ont été les plus humbles en acceptant de dire ce dont ils étaient à peu près sûrs vs les zones sur lesquelles ils ne savent pas
A garder en tĂŞte donc :
- produire de l’Ă©tude soi-mĂŞme permet 1- de se poser les bonnes questions 2- d’Ă©viter le “moi je” 3- d’aller Ă la rencontre de vrais publics 4- de rencontrer une première masse critique de “prospects”
- aller absolument dans le dĂ©tail des mĂ©thodologies des Ă©tudes accessibles en ligne afin d’Ă©viter les donnĂ©es ou tendances trop vagues
- rĂ©flĂ©chir avec une vraie mĂ©thodologie en filtre (depuis le plus large – par exemple Google Trends – jusqu’au plus spĂ©cifique) afin de structurer son terrain de jeu
Le problem-solving est un tueur d’idĂ©es
Les mĂ©thodologies Ă©levĂ©es au rang de religion et distillĂ©es via Harvard, Ă savoir celles de problem-solving, peuvent ĂŞtre – très – contre-productives quand pas totalement maĂ®trisĂ©es. Quelques revers observĂ©s :
- aller trop vite sur l’analyse du “problème” et se concentrer sur des solutions bancales Ă cause d’un pĂ©rimètre mal…dĂ©fini
- un problème d’analyse du problème en pĂŞchant par manque de curiositĂ© (se plonger dans l’histoire, demander Ă google) : certaines idĂ©es Ă©taient des copycats bien involontaires de business lancĂ©s il y a quelques annĂ©es
Quelques idées en vrac :
- ne pas cesser d’interroger le “problème” afin de bien ĂŞtre sĂ»r qu’il s’agit d’un vrai “problème”
- appeler des copains qui gravitent dans les milieux afin de prétester des concepts et profiter de leur expérience
- peut-ĂŞtre ne pas seulement se concentrer sur des problèmes imminents mais plutĂ´t se concentrer sur des problèmes Ă venir…ou sur des rĂŞves qui ne sont pas en soi des “problèmes”
Et l’Asie ?
Une petite critique qui n’est pas propre Ă ce hackathon mais bien plutĂ´t Ă la culture startup actuelle semble ĂŞtre la fascination pour la Silicon Valley mais une absence quasi totale de comprĂ©hension de ce qu’il se passe en Asie, et plus particulièrement en Chine. Je pense que ce biais va changer avec les prochaines gĂ©nĂ©rations (qui apprennent le Chinois au collège).
La créativité peut naître du techie !
Les groupes qui m’ont le plus impressionnĂ© semblaient ĂŞtre ceux qui ont su dĂ©velopper en un temps ultra rapide (moins d’une semaine) un rapport horizontal vis-Ă -vis de la crĂ©ativitĂ©. En plus concret, on pouvait sentir que certains groupes avaient du mal Ă intĂ©grer les talents plus techniques et pouvaient mĂŞme exclure le ou la techie du processus crĂ©atif. A contrario, les groupes qui ont fait du techie non pas le support IT mais un co-crĂ©ateur de l’idĂ©e crĂ©ative ont excellĂ© dans les prĂ©sentations. Ce qui confirme cet adage suivant :
- Une idée = ne vaut pas grand chose
- Une idée + une équipe = un début de quelque chose
- Une idĂ©e + une Ă©quipe + une exĂ©cution technique = un potentiel Ă tester…ou pas
- Une idée + une équipe + une exécution technique + des premières communautés = une preuve de concept
Ce que j’en retiens :
- la culture du feedback immĂ©diat est assez violente, et pourtant cruciale : on ne juge pas des individualitĂ©s mais bien un “output” qu’une Ă©quipe doit sortir. Il faudrait briser le mode d’Ă©valuation qui tend Ă mettre les jeunes pousses dans une logique de consommateur pour les mettre lĂ oĂą ils sont rĂ©ellement bons : comme des crĂ©ateurs Ă plusieurs, donc coresponsables des autres et de soi. Le marchĂ© est d’une violence inouie si on n’a jamais eu une remise Ă zĂ©ro de nos certitudes pendant ce terrain de jeu protĂ©gĂ© que sont les Ă©tudes
- un jury n’a aucune certitude a priori et souhaite surtout qu’on le fasse vibrer, comme un consommateur somme toute : ça ne sert Ă rien d’aller chercher son aval professoral mais plutĂ´t d’essayer de lui mettre quelques Ă©toiles dans les yeux (mais des Ă©toiles tangibles !) afin qu’il soit en posture de vouloir en ĂŞtre
Un grand merci à Lucas Delattre (IFM) et à mes pairs lors de cet événement :
- Clarisse Reille, prĂ©sidente du DEFI, qui m’a rappelĂ© que mettre des mots sur un problème, c’est dĂ©jĂ y rĂ©pondre.
- Paul Mouginot (Daco) pour sa connaissance magistrale notamment du retail et de la data.
- Etienne Durand (agence Hopscotch) pour le reality-check et la capacité à analyser tout en encourageant.
- Chloé Boutevin (Faber Novel) pour les réactions de bonne strategic planner / analyste (qui me rassurait sur mes propres réactions)
- Allan Joseph (Futur 404) pour les insights et la capacité à réinterroger un propos
- Laure Morat (Louis Vuitton) pour les insights clairs partagés avec les groupes et la réinterrogation des groupes pour les emmener plus loin !
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